Depuis le début des affrontements au Soudan, une crise humanitaire sans précédent frappe les régions frontalières du Tchad. Près de 910.000 personnes ont franchi la frontière, fuyant la violence qui sévit au Darfour. Parmi ces déplacés, plus de 201.379 sont des Tchadiens retournant sur leur terre d’origine. Ce nombre, selon l’Organisation Internationale pour les Migrations (OIM), pourrait atteindre 240.000 d’ici à la fin de l’année 2024. Face à cette situation, des actions concertées sont mises en place pour gérer l’afflux massif et garantir un avenir plus stable à ces populations vulnérables.
La violence qui a ravagé le Soudan, en particulier la reprise des hostilités au Darfour, a forcé des milliers de Tchadiens à revenir dans leur pays natal. Ces « retournés », des hommes, femmes et enfants ayant autrefois trouvé refuge au Soudan, se retrouvent désormais confrontés à une situation critique : l’insécurité alimentaire, le manque de logements et l’absence d’infrastructures sanitaires adéquates sont autant de défis qu’ils doivent surmonter. Toutefois, ce retour forcé pourrait aussi constituer une opportunité pour renforcer la résilience des communautés locales et bâtir un avenir durable.
L’OIM, en partenariat avec la Commission Nationale d’Accueil, de Réinsertion des Réfugiés et des Retournés (CNARR), a rapidement réagi en mettant en place un système d’enregistrement des nouveaux arrivants dans 52 localités des provinces du Ouaddaï et de Sila. Ce dispositif, soutenu par un centre d’enregistrement au lycée d’Adré, permet de recenser les besoins immédiats de ces ménages, facilitant ainsi la distribution d’une aide humanitaire plus ciblée. Chaque semaine, en moyenne 210 ménages de retournés sont enregistrés, un effort indispensable pour assurer une réponse rapide et efficace.
Depuis le début de la crise, 131 220 retournés ont déjà reçu une assistance multisectorielle, couvrant des besoins allant de la nourriture à l’accès à l’eau potable, en passant par des soins de santé primaires. L’enjeu est désormais de dépasser l’urgence pour construire des solutions durables.
Dans le village de Tongori, l’OIM s’efforce de transformer cette crise en une occasion de rétablissement à long terme. Abandonnant les abris transitoires en paille, l’organisation soutient la construction de maisons en briques, offrant aux retournés un habitat plus solide et plus sécurisé. Récemment, 17 ménages ont bénéficié d’une aide financière pour le transport des briques, marquant un pas significatif vers l’amélioration des conditions de vie.
Ces efforts ne se limitent pas à l’accès à un logement. L’OIM, avec ses partenaires, s’engage également dans des initiatives visant à renforcer la cohésion sociale et à prévenir les violences, notamment sexuelles, dans ces communautés fragilisées. La visite du Représentant Spécial auprès du Secrétaire Général des Nations Unies à Tongori le 16 juillet dernier témoigne de l’importance accordée à la protection des femmes retournées, souvent premières victimes des conflits.
Pour mieux comprendre et gérer les flux de déplacés, l’OIM a mis en place la Matrice de suivi des déplacements (DTM), un outil essentiel pour analyser les mouvements de population. En collaboration avec la CNARR, des équipes déployées dans les zones reculées du Sila et du Ouaddaï assurent un enregistrement biométrique des ménages les plus vulnérables. Cette approche garantit que l’aide parvienne à ceux qui en ont le plus besoin.
La réponse humanitaire à cette crise ne peut se faire sans une coordination étroite entre les acteurs nationaux et internationaux. L’OIM, en tant qu’agence principale pour la gestion des retournés, collabore avec le HCR, l’OCHA, l’UNICEF, et de nombreuses ONG pour fournir une assistance vitale aux populations affectées.
La situation des retournés tchadiens représente un défi de taille pour le Tchad et ses partenaires. Cependant, avec une approche intégrée mêlant urgence humanitaire et initiatives de développement à long terme, cette crise pourrait bien être le catalyseur d’une transformation positive dans les provinces du Ouaddaï et de Sila, offrant à des milliers de personnes la possibilité de reconstruire leur vie sur des bases plus solides.